CAP Incontinence urinaire opérationnalisé
Problème -
Déclenchement -
Recommandations -
Complément
Problème
L’incontinence correspond "à une perte involontaire d’urine dans un lieu et/ou à un moment inappropriés objectivement constatée". Elle peut résulter d’un dysfonctionnement du système urinaire ou de difficultés d’adaptation de la personne à son milieu de vie (toilettes à l’étage, handicap moteur, médicaments diurétiques….).
Il est important de dépister et de prévenir l’incontinence urinaire chez la personne âgée car l’âge est un facteur de risque (fréquence de l’incontinence urinaire augmente avec le vieillissement). Discuter librement de ce problème avec la personne et sa famille est la première étape de la mise en place d’un plan de soin réussi.
L’incontinence urinaire peut entraîner de nombreuses répercussions (irritation de la peau, infections à répétition, septicémie, chutes, irritation locale pouvant conduire à l’escarre de décubitus, inconfort lié à l’utilisation de sondes urinaires …). Les conséquences psychologiques et sociales de l’incontinence urinaire ne sont pas à négliger (sentiment de honte, repli sur soi, isolement social, conduites d’évitement, décision d’une admission en MR/MRS, perte d’autonomie…).
PRINCIPAUX OBJECTIFS DES SOINS
- rechercher systématiquement une éventuelle incontinence urinaire ;
- repérer les facteurs déclenchants et/ou aggravants (réduction de la mobilité pour cause de douleur, d’essoufflement, d’hypotension orthostatique, infection urinaire, fécalome, ablation récente d’une sonde à demeure, lithiase, prescription récente de diurétiques, d’antihypertenseurs, de psychotropes, inadaptation de l’environnement..) ;
- préciser le type d’incontinence urinaire ;
- tenter d’améliorer autant que possible la fonction urinaire ;
- poser un diagnostic approprié qui permettra ultérieurement de choisir les stratégies thérapeutiques adaptées (traitement médicamenteux, rééducation, mesures palliatives) ;
- empêcher la détérioration de l’incontinence urinaire chez des personnes déjà incontinentes.
Déclenchement
L’objectif du CAP "Incontinence urinaire" est double :
- améliorer autant que possible la fonction urinaire ;
- prévenir une détérioration de la fonction urinaire chez des personnes pouvant bénéficier d’une prise en charge.
Ce CAP distingue deux groupes de personnes pour lesquelles le CAP est déclenché. Ces deux groupes nécessitent un suivi spécialisé :
Groupe à risques pour faciliter l’amélioration de la fonction urinaire
Les personnes qui présentent TOUTES les caractéristiques suivantes sont inclues dans ce groupe :
- elles présentent quelques épisodes d’incontinence réguliers (même si moins d’une fois par semaine) ;
- elles ont au moins un niveau minimum de capacité cognitive (score indépendant ou indépendance atténuée au niveau des aptitudes cognitives pour la prise des décisions quotidiennes) ;
- pas totalement dépendantes dans la locomotion ;
- présentent une ou les deux caractéristiques suivantes
- PAS dans un programme mictionnel
- un ou plusieurs des indicateurs de fluctuation suivants qui suggèrent que la personne est dans un statut fluctuant et que par conséquent l’incontinence urinaire est d’apparition récente et susceptible de s’améliorer :
- fracture de la hanche
- récent déclin dans les AVQ
- utilisation d’une sonde urinaire à demeure
- pneumonie
- diarrhée
Groupe à risques pour prévenir la détérioration
Sont inclues dans ce groupe les personnes qui cumulent les caractéristiques suivantes :
- présentent au moins plusieurs épisodes d’incontinence (même si moins qu’hebdomadairement) ou qui n’ont pas de conduit urinaire ;
- sont indépendantes à modérément diminuées au niveau des facultés cognitives pour la prise des décisions quotidiennes ;
- ne rencontrent AUCUN des deux critères aigus du premier groupe (programme mictionnel et statut fluctuant).
Non déclenché – Continent à la base
Ils sont continents à la base.
Non déclenché – Prise de décisions pauvre à la base
A la base, ils présentent une détérioration sévère des facultés cognitives (ou une conscience complètement altérée) pour la prise des décisions quotidiennes.
Recommandations
On dénombre de multiples classifications relatives à l’incontinence. Il existe une classification en 4 catégories identifiant des causes distinctes pour chaque type d’incontinence :
- incontinence de stress ;
- incontinence d’urgence ;
- mixte (stress et urgence) ;
- par regorgement.
Les différents types d’incontinence
- Incontinence de stress : il s’agit de l’incontinence qui se produit durant la toux, l’éternuement, le rire, le déplacement d’objets lourds ou lorsque la personne réalise d’autres mouvements qui exercent une pression ou un stress sur la vessie. Ce cas de figure est la forme la plus fréquente d’incontinence chez la femme et résulte d’une perte de tonus des muscles pelviens ou d’une faiblesse dans la paroi séparant la vessie du vagin. Chez les femmes, cette faiblesse est fréquemment due aux grossesses et accouchements ou à une insuffisance du niveau d’oestrogènes durant les cycles menstruels ou après la ménopause. Chez les hommes, l’incontinence de stress peut se produire après ablation de la prostate. Souvent, l’incontinence est éradiquée ou diminue notablement en fréquence suite aux mesures suivantes :
- Réhabilitation de la musculation du plancher pelvien dans les cas où l’on décèle son inefficacité auprès de personnes affectées d’incontinence due au stress. Il pourra s’agir de la première ligne de traitement proposée.
- Conseils dans la vie quotidienne afin d’encourager l’ingestion d’une quantité appropriée de liquide (ne pas restreindre l’hydratation), de limiter l’alcool et les boissons contenant de la caféine, de favoriser la perte de poids chez les individus en surcharge pondérale.
- Prescription de médicaments conjointement à des exercices de renforcement du plancher pelvien. Ces médicaments peuvent toutefois avoir des effets secondaires.
- Le biofeedback, l’acupuncture, l’électro-stimulation peuvent être utilisés en association avec des programmes de rééducation du plancher pelvien.
- Dispositif intra vaginal (ex. : pessaires).
- Implants
- Chirurgie.
- Incontinence d’urgence : il s’agit d’une émission d’urine involontaire après avoir ressenti un soudain besoin d’uriner. Cela peut arriver pendant le sommeil, en buvant de l’eau ou en écoutant l’eau s’écouler. Le traitement de l’incontinence d’urgence comporte :
- Biofeedback.
- Mictions programmées.
- Entraînement de la vessie.
- Prescription de médicaments comme des anticholinergiques ou des antispasmodiques qui relâchent les muscles et bloquent les signaux nerveux qui provoquent les spasmes vésicaux.
- Incontinence mixte : fuite involontaire associée à l’urgence mais aussi à l’effort, l’éternuement ou la toux. Les causes principales (stress ou urgence) devraient être traitées en première intention.
- Incontinence par regorgement : se produit lorsque la vessie est constamment remplie à un point tel qu’elle déborde et qu’une fuite urinaire a lieu. Ceci peut arriver lorsque l’urètre est bloqué en raison de calculs rénaux ou vésicaux, d’une tumeur ou d’une hypertrophie de la prostate. Cela peut également résulter d’une faiblesse des muscles vésicaux, provoquée par un endommagement des nerfs résultant du diabète ou d’autres maladies. Ceci est une forme fréquente de l’incontinence masculine. Le traitement comporte :
- Miction
- Entraînement de la vessie
- Sondage intermittent
- Chirurgie et radiothérapie
- La prescription de médicaments tels que ceux listés ci-dessous peuvent être prescrits afin d’améliorer l’écoulement d’urine ou le rétrécissement de la prostate :
- alpha-bloquants : utilisés pour traiter les problèmes causés par l’augmentation de volume de la prostate et l’obstruction à la sortie de la vessie ;
- inhibiteurs de la 5-alpha-réductase : sont prescrits pour réduire le volume de la prostate.
- Incontinence fonctionnelle : il s’agit d’une perte d’urine chez une personne dont l’état de la fonction urinaire est tel qu’elle pourrait encore être en mesure de maintenir la continence mais qui n’est plus capable de rejoindre la toilette en temps utile à cause de déficiences physiques, d’obstacles externes, de problème d’orientation ou de communication. La disparition ou la réduction de l’incontinence dépend de l’identification et du traitement des problèmes sous-jacents (voir CAP "AIVQ" pour l’amélioration de la mobilité et des transferts).
Evaluation de l’incontinence
De multiples facteurs peuvent entraîner ou aggraver l’incontinence. Le repérage et l’amélioration de ces facteurs est fondamental. Les facteurs de risque (âge, ablation récente de sonde à demeure, infection urinaire, un BMI (Body Mass Index élevé ….) seront systématiquement recherchés lors de l’anamnèse. Certains facteurs de risque sont dépendants du sexe (pathologies prostatiques chez l’homme, grossesses, accouchements et ménopause chez la femme).
L’anamnèse est importante pour recueillir des informations précises et préciser si l’incontinence est transitoire ou définitive. Les questions viseront à préciser le mode d’installation de l’incontinence, les symptômes ainsi que les éventuels facteurs de risque. L’anamnèse pourra être complétée en utilisant un journal de miction (détaillant les moments et l’importance de l’incontinence, la quantité d’urine émise lorsque la personne atteint la toilette, les circonstances ex. : lorsque l’on s’installe dans le fauteuil).
Test
- Examen clinique (y compris examen pelvien et rectal)
- Test du stress (ex. : vérifier lorsqu’une femme tousse s’il y a fuite urinaire ou non)
- Observation de l’élimination ou mesure du flux urinaire (examen de la force du jet, du délai éventuel, du volume d’urine)
- Analyse d’urine
- Culture urinaire
- L’évaluation du résidu post-mictionnel est un paramètre de diagnostic important qui peut être évalué auprès des patients ayant des antécédents complexes
- Cystoscopie
- Evaluation urodynamique
- Examen gynécologique
Delirium
Infection
Atrophie vaginale
Médicaments
Problèmes psychologiques et psychiatriques
Excès de liquides
Restriction de la mobilité
Constipation/fécalome
Ces facteurs peuvent être contrôlés afin d’améliorer la continence et devraient être systématiquement pris en charge :
- Délirium : identifier la cause du Délirium (voir CAP "Délirium")
- Infection : repérer des symptômes d’infection urinaire (présence de sang dans les urines, mictions fréquentes, sensation de brûlure lors de la miction, augmentation des globules blancs dans les analyses d’urine). Référer le patient pour un examen médical complémentaire comportant une analyse d’urine, une culture et l’instauration d’un traitement médicamenteux (antibiotiques ou antiseptiques).
- Atrophie vaginale : l’utilisation de crèmes appropriées ou d’un anneau à oestrogènes peuvent être bénéfiques.
- Atrophie de l’urètre : elle mène à un rétrécissement de la paroi de l’urètre, aboutissant à une irritation locale et à la diminution de la production de mucus. L’incontinence due à une atrophie de l’urètre se caractérise souvent par l’urgence et la dysurie (douleur à la miction).
- Médicaments : Les médicaments peuvent provoquer ou aggraver l’incontinence transitoire mais peuvent aussi être utiles pour l’amélioration de la continence. Il est pertinent d’examiner les prescriptions médicamenteuses du patient pour détecter d’éventuels effets sur l’incontinence. La consommation d’alcool et de médicaments sont les causes principales d’incontinence temporaire chez les personnes âgées (voir CAP "Médication appropriée" et CAP "Consommation de tabac et d'alcool").
- les diurétiques (administrés pour réduire la pression sanguine ou pour traiter la décompensation cardiaque) peuvent provoquer l’apparition d’une incontinence d’urgence ;
- les anticholinergiques peuvent provoquer une incontinence par regorgement (ces médicaments inhibent la contraction de la vessie, produisant un remplissement excessif de la vessie et des fuites urinaires ;
- certains médicaments peuvent entraîner une incontinence nocturne. Celle-ci peut également être causée ou renforcée par une défaillance cardiaque ou une insuffisance veineuse périphérique. Avant de modifier le traitement de la personne, un médecin doit être contacté ;
- Problèmes psychologiques et psychiatriques : habituellement dans le cas d’une dépression sévère (voir CAP "Humeur"). L’incontinence urinaire peut également entraîner des troubles de l’humeur chez le patient. Le traitement initial consistera à traiter la dépression.
- Emission excessive d’urine : peut être causée par une ingestion trop importante de liquides (y compris l’alcool et la caféine). Le patient pourra être encouragé à boire moins afin d’atteindre une quantité d’urine par 24 heures entre 1000 et 2000 ml.
- Mobilité restreinte : ceci peut empêcher le patient d’atteindre la toilette à temps et peut résulter de limitations physiques, d’une incapacité à quitter seul le lit ou le fauteuil, de troubles de la vision, de la peur d’une chute, de problèmes aux pieds (voir CAP "AVQ" pour des suggestions relatives à l’amélioration de la mobilité, voir CAP "Promotion des activités physiques" pour des suggestions d’exercices);
- Constipation/fécalome : la persistance de la constipation peut aboutir à un fécalome (une masse de selles durcies dans le conduit intestinal). La présence d’un fécalome mène à une pression ou une stimulation de la vessie. Souvent, ces patients présentent une incontinence d’urgence ou par regorgement et peuvent également présenter une incontinence fécale. Ôter le fécalome peut permettre de rétablir la continence. Par ailleurs, il conviendra d’examiner le régime de défécation, les médicaments de la personne, ses habitudes alimentaires ainsi que l’activité physique pratiquée.
Appareillage et protections
Facteurs à examiner pour l’utilisation de protections
- Adaptées à la morphologie du patient
- Coût
- Capacité d’absorption de la protection envisagée (choisir une protection avec une capacité d’absorption adaptée au type d’incontinence présentée par le patient)
- Niveau d’activité de l’utilisateur (personne assise la plupart de la journée, personne qui marche et change de position plus fréquemment)
- Capacité de l’utilisateur à mettre et ôter la protection – autonomie de l’utilisateur dans l’utilisation de la protection.
Complément
- LIVRES
- Chassagne P, Bentot C, Druesne L. Dépistage et prévention de l’incontinence urinaire. In : C. Trivalle, Gérontologie préventive – Eléments de prévention du vieillissement pathologique. Masson, Paris, 2002
- ARTICLES
- Balmforth JR, Mantle J, Bidmead J, Cardozo L. A prospective observational trial of pelvic floor muscle training for female stress urinary incontinence. BJU Int. 2006; 98(4):811-7
- Dingwall L. Promoting effective continence care for older people : a literature review. Br J Nurs 2008; 17(3):166-72
- Ouslander JG, Schapira M, Schnelle JF, Uman G, Fingold S, Tuico E, Nigam JG. Does eradicating bacteriuria affect the severity of chronic urinary incontinence in nursing home residents ? Ann Intern Med 1995; 122:749-754
- Ouslander JG, Schnelle JF, Uman G, Fingold S, Nigam JG, Tuico E, Bates-Jensen B. Predictors of successful prompted voiding among incontinent Nursing Home Residents. JAMA 1995; 273:1366-70
- Van Oyen H, Van Oyen P. Urinary incontinence in Belgium : prevalence, correlates and psychosocial consequences. Acta Clin Belg 2002; 57(4):207-18
- Wagg A, Potter J, Peel P, Irwin P, Lowe D, Pearson M. National audit of continence care for older people : management of urinary incontinence. Age Ageing 2008; 37(1):39-44
- RECOMMANDATIONS
- Thüroff J, Abrams P, Andersson K-E, Artibani W, Chartier-Kastler E, Harpel C, Van Kerrebroeck PH. Guidelines on urinary incontinence. European Association of urology 2006.