III. Directives

ETAPE 1: Observation de létat du patient
ETAPE 2: Recherche et diagnostic
ETAPE 3: Traitements et mesures
ETAPE 4 : Suivi

PLAN PAR ETAPE

ETAPE 1: Observation de l’état du patient

  • L’activation de ce CAP avec un code 1, indique que le patient présente des signes de problèmes cognitifs et qu’il faut prévenir un risque de déclin ultérieur. Une première initiative à prendre est d’observer la situation du patient. On obtient de cette façon, en tant que soignant, une image plus claire de ses limitations cognitives et fonctionnelles, de ses capacités. Il est alors possible d’examiner comment impliquer au maximum le patient dans les décisions et les activités quotidiennes. De plus, les constatations peuvent être rapportées de manière efficace à un médecin.
  • Observer ou s’informer (auprès du patient et du soignant le plus proche) des possibles signes/symptômes de déclin cognitif et déterminer depuis quand ils sont présents. Normalement, les changements apparaissent très graduellement et sont progressifs:
    • Troubles de la mémoire (par ex. oubli des numéros de téléphone, des noms, des courses, nécessité de rappeler les choses plusieurs fois, ...)
    • Troubles de l’orientation dans le temps et/ou dans l’espace
    • Problèmes de prises de décisions ou de capacités de jugement
    • Modifications du comportement (comportement agressif, irritabilité, perte d’intérêt, agitation, apathie, désinhibition, …)
    • Diminution de la capacité à raisonner, à planifier
    • Affabulation ou hallucinations
    • Troubles du langage (difficultés à trouver les mots, les noms, fautes grammaticales) ou troubles de la compréhension (problèmes à comprendre les autres)
    • Troubles de l’attention et de la concentration
    • Fluctuation des fonctions mentales durant la journée
    • (Plaintes quotidiennes répétées/préoccupation)
    • Déclin fonctionnel (par ex. besoin de d’assistance supplémentaire pour les activités A(I)VQ), en l’absence d’affections/troubles physiques ou d’affaiblissement physique, comme des affections somato-organiques (par ex. déficience cardiaque), des affections musclo-squelettiques (par ex. arthrose ou fracture) ou des affections neurologiques (par ex.. poly-neuropathie, AVC ). Il faut également être attentif aux problèmes de chute, d’incontinence, de troubles de l’équilibre, de mauvaises conditions alimentaires et à la perte de poids et toujours examiner s’il existe d’autres raisons possibles de déclin fonctionnel, comme l’utilisation de remèdes ou médicaments (alcool, benzodiazépines, antidouleurs, …)

Attention: Tous les signes/symptômes repris ci-dessus ne sont pas présents chez chaque patient. Il est toutefois très important de les parcourir pour obtenir une image globale des limites et capacités du patient.

  • Vérifier ensuite si on a déjà diagnostiqué chez le patient des affections qui peuvent être associées à des troubles cognitifs (par ex. maladie d’Alzheimer, maladie de Parkinson)
  • Discuter de la situation du patient avec le médecin. En cas de suspicion de déclin cognitif, le patient doit être examiné de façon plus approfondie de manière à détecter les causes du déclin et à pouvoir débuter un traitement approprié. Passer ensuite à l’étape 2.

ETAPE 2: Recherche et diagnostic

  • Différentes causes peuvent être à l’origine d’un déclin cognitif. On pense souvent à des causes irréversibles comme les affections neuro-dégénératives mais dans certains cas le déclin peut aussi être réversible. La recherche des possibles causes/affections traitables et réversibles et l’examen de la présence de démence sont des objectifs très importants. Ils sont nécessaires pour pouvoir mettre sur pied un traitement correct et ainsi lutter contre un déclin ultérieur. C’est un médecin qui pose le diagnostic (de savoir s’il y a ou non démence, délirium,...). Néanmoins, d’autres soignants peuvent y contribuer par un rapport précis de leurs observations. Une bonne communication entre le(s) médecin(s) et l’équipe de soins est donc nécessaire.
  • Il est possible qu’un patient qui a un score CPS bas (=MMSE de 19 ou plus) soit au premier stade de la démence. Toutefois, en cas de troubles cognitifs, il faut toujours exclure toutes les causes réversibles (surtout en présence de délirium, car le syndrome est courant) et attendre un rétablissement, avant qu’un déclin puisse être imputé à une pathologie chronique.
  • Examiner les causes et/ou facteurs de risque réversibles possibles de la perte cognitive, même chez les patients pour lesquels on a constaté une démence. Chez eux, une perte récente de cognition ou une aggravation des symptômes peut également être réversible.
    • Le delirium (voir le CAP « delirium » pour plus d'explications concernant la pose du diagnostic et le traitement). De meilleures performances cognitives peuvent être attendues dès que l’état délirant a disparu.
    • La dépression (voir le CAP « trouble de l’humeur » pour plus d'explications concernant la pose du diagnostic et le traitement). Les symptômes de la dépression peuvent occasionner un déclin cognitif qui, de façon erronée, peut être interprété comme démence ou délirium. (distinction démence-dépression-delirium voir annexe 1).
    • D’autres problèmes médicaux comme les infections, la déshydratation, une insuffisance cardiaque, une broncho pneumopathie chronique obstructive (BPCO), la constipation, les maladies chroniques du foie et les insuffisances rénales peuvent provoquer un déclin cognitif. Le traitement de ces affections peut influencer favorablement le fonctionnement cognitif et la qualité de vie du patient. Chez un patient présentant un déclin cognitif, il faut discuter avec le médecin afin de savoir s’il peut être mis en relation avec de telles affections.
    • La douleur a un impact négatif sur la cognition. Elle peut conduire à des problèmes comportementaux, à l’irascibilité et à une perte fonctionnelle, ce qui peut malencontreusement être interprété comme un déclin cognitif (N.B. : la douleur peut aussi être une cause de delirium).
    • La médication peut provoquer un déclin cognitif, surtout à l’instauration d’un nouveau traitement médicamenteux ou lors de son arrêt (par exemple une médication psycho-active entre autre. Faites aussi attention aux plantes ou aux médicaments alternatifs, aux signes de consommation d’alcool chronique ou aiguë et à l’usage de drogues) (N.B. : la médication peut aussi être une cause de delirium)
Attention : un delirium qui se greffe sur une démence peut expliquer un changement aigu au niveau du comportement et de la cognition !
  • Après que les causes réversibles d’un déclin cognitif aient été exclues et qu’aucune démence n’ait été diagnostiquée dans les antécédents du patient, il faut envisager la recherche d’une éventuelle démence. Le diagnostic de démence est établi par un médecin avec expertise dans ce domaine sur base des critères de diagnostic du DSM-IV-TR (voir annexe 2). On utilise en grande partie les critères spécifiques pour la maladie d’Alzheimer du ‘National Institute of Neurological and Communicative Disorders and Stroke et l’Alzheimer Disease Related Disorder Association (NINCDS-ADRDA) (voir annexe 3). La pose du diagnostic comprend une anamnèse approfondie et une hétéroanamnèse, une étude clinique complète (de médecine interne et neurologique), une évaluation des fonctions cognitives (au moyen du MMSE et éventuellement de tests neuropsychologiques complémentaires), un examen d’imagerie cérébrale et une recherche en laboratoire. Le médecin peut toujours renvoyer le patient vers une clinique de la mémoire pour une recherche spécialisée plus approfondie (par ex. en cas de doute ou de recherche du type de démence).
  • Suivre les autres étapes possibles dans le processus de diagnostic :
    • 1. Parcourir les symptômes/plaintes observés dans l’étape 1, le moment de leur apparition, leur déroulement et leur durée
    • 2. Examiner les causes réversibles du déclin cognitif (voir points précédents). Envisager une recherche ultérieure de la démence :
      • Anamnèse et hétéroanamnèse du partenaire/de l’aidant proche
        • Objectif = Contrôler la présence et la gravité des troubles cognitifs en :
          • En posant des questions sur le passé récent et éloigné, par exemple :
            • a. Demander au patient ce qu’il a mangé les jours précédents, poser des questions sur son mariage, son métier, ses enfants, demander s’il suit l’actualité et s’il peut en parler.
            • b. Demander à la famille si le patient oublie régulièrement les événements ou les rendez-vous.
            • c. Des questions complémentaires sont possibles.
          • En évaluant le langage du patient (difficulté à trouver les mots, confondre les choses, difficulté à reconnaître les objets).
          • En testant la conscience, la concentration, et l’attention (exemple de test de l’attention : faire répéter des séries de chiffres),…
      • Evaluation cognitive
        • Objectif = Examiner le déroulement, la gravité et la nature des troubles cognitifs en utilisant un instrument de mesure tel que le Mini-Mental State Examination (MMSE, voir annexe 4).
        • Des tests neuropsychologiques spécifiques complémentaires sont possibles.
      • Examen clinique interne et neurologique par un médecin
      • Recherche en laboratoire
        • Fonction de la thyroïde, fonction des reins et du foie, image du sang, dosage de l’acide folique, calcium et vitamin B-12, CRP
      • Imagerie médicale:
        • Scanner,RMN du cerveau
    • 3. Etablir le diagnostic de démence et en déterminer le type et les causes (il est possible de renvoyer le patient vers un médecin spécialiste)
      • Type?
        • Différenciation sur base de critères
        • Classement des démences corticales et subcorticales sur base de données obtenues dans une vaste interview comme, entre autre la CAMDEX-R (voir annexe 5). Des données complémentaires sont naturellement nécessaires mais elles ne sont pas présentéees ici.
      • Causes?
        • Les causes les plus courantes
  • Remarque: Les causes incriminées dans la démence, un manque d’acide folique ou de vitamine B-12, des troubles du métabolisme du calcium, du travail de la thyroïde ou la consommation excessive d’alcool, peuvent encore être réversibles.
  • Passer à l’étape 3 dès que les causes du déclin cognitif sont établies, de façon à ce qu’un traitement spécifique et des soins puissent être mises en place.

ETAPE 3: Traitement et mesures

La politique de soins pour les problèmes cognitifs consiste d’une part en (1) un traitement des causes identifiées des problèmes cognitifs et, d’autre part en (2) des mesures complémentaires et de soutien. Il faut toujours vérifier ici si le traitement peut être appliqué en ambulatoire ou si un renvoi en hôpital ou en clinique de la mémoire est nécessaire. Les traitements spécifiques de certains problèmes sont très efficaces et ont un effet favorable sur les capacités cognitives.

1. Traitement de la/des cause(s) trouvée(s) au déclin cognitif:

  • Causes réversibles de la perte cognitive ou du déclin récent:
    • Traitement du delirium et de la dépression : voir CAP “Delirium-traitement” et CAP “Dépression”
    • Traitement de la déficience en acide folique, en vitamine B-12 et calcium, trouble endocrinien, abus d’alcool, déshydratation, infections, … de la démence réversible
  • Démence comme cause de la perte cognitive:
    • Le traitement de la démence dépend des causes sous-jacentes. Chez la plupart des patients présentant une démence, un traitement spécifique causal n’est pas possible, parce qu’il s'agit d'une démence primairement neuro-dégénérative, et une combinaison de mesures symptomatiques et de soutien est amorcée.
      • Traitement symptomatique
        • Du déclin cognitif:
          • Pour la maladie d’Alzheimer, il y a, depuis quelques années, des médicaments disponibles qui ralentissent le déclin cognitif, comme, par exemple les anticholinestérasiques (Exelon, Reminyl, …) et les antagonistes des récepteurs NMDA (Memantine)
        • Des symptômes comportementaux comme l’agitation, l’agressivité, la peur (voir le CAP “Comportement" pour plus d’informations):
          • Les traitements médicamenteux spécifiques contre l’agressivité, l’agitation, la peur et les hallucinations, comme les antipsychotiques, peuvent être efficaces mais peuvent également avoir un effet défavorable sur les capacités cognitives.
          • Certains problèmes de comportement ne constituent pas une menace pour le confort, la sécurité, la santé ou les activités du patient et n'exigent donc pas de traitement direct.
          • Si certains problèmes de comportement (par ex. l’excitation, l’agitation) influencent les soins prodigués ou l'implication du patient dans les activités, peut-être qu’un autre environnement serait meilleur pour le patient. Si le patient essaie de s’associer aux décisions importantes (par ex. où il/elle veut vivre), il est certainement au premier stade du déclin cognitif.
      • Mesures de soutien par tous les soignants. Diverses mesures peuvent aussi être appliquées à tous les patients souffrant de déclin cognitif et pas uniquement aux patients souffrant de démence.
        • Stimuler les capacités encore présentes du patient comme l’activité physique et mentale, la participation à des activités, la mobilité.
        • Pourvoir à un cadre clair, à la régularité, des points de repère, …
        • En cas d’agitation sévère, laisser le patient le moins longtemps possible sans surveillance.
        • Veiller à assurer la continuité : éviter, dans la mesure du possible, le changement dans le personnel infirmier intervenant auprès du patient.
        • Approcher le patient de façon calme, empathique et compréhensive, pour qu’il se sente compris et accepté.
        • Se soucier de la dignité du patient (vêtements propres, cheveux, hygiène). C’est important pour l’image que le patient a de lui-même, surtout au premier stade de la démence.
        • Veillez à une santé physique optimale, prêter attention à l’alimentation, aux selles, à une éventuelle gêne physique, à l’inconfort, à la douleur, …
        • A un stade plus avancé de la démence, veiller à faire attention au vécu, au souvenir, à pratiquer le Snoezelen,…
        • Expliquer la démence, ses phénomènes et ce qui va se passer aussi bien au patient qu’à sa famille. Donner des informations sur les groupes d’aide et les organisations où les patients et leurs aidants peuvent s’adresser (Ligue Alzheimer Expertisecentrum Dementie Vlaanderen,…)
        • Apporter un soutien dans le travail de deuil
        • Soutenir la famille ou les/l’aidant(s) (aide informative, émotionnelle et pratique)
2. Mesures de soutien complémentaires. Ces mesures peuvent être appliquées à tous les patients souffrant d’un déclin cognitif
  • Généralité: les mesures de soutien pour les patients souffrant de démence décrites ci-dessus peuvent aussi être appliquées ici.
  • En ce qui concerne la communication
    • Beaucoup de patients souffrant de déclin cognitif ne peuvent pas toujours communiquer de façon efficace. Beaucoup de comportements qui semblent incompréhensibles pour autrui (par ex. crier ou faire du tapage) représentent parfois pour le patient, la seule possibilité de communiquer (voir aussi le CAP «Communication »). Les mesures suivantes sont importantes:
      • Contrôler si le patient est en mesure de, ou s’il est préparé à communiquer de manière sensée.
      • Discuter avec l’aidant/la famille de la meilleure méthode de communication.
      • Utiliser éventuellement des techniques de communication non-verbale (par ex. le contact, les gestes) pour encourager le patient à réagir.
  • En ce qui concerne l’implication dans la vie quotidienne
    • Observer et évaluer les capacités du patient avec, pour objectif, de les stimuler:
      • Y a-t-il, par exemple, des moments où le patient se montre plus autonome, désire faire plus de choses de façon indépendante, avoir le contrôle de son corps, de ses membres et de ses mains ?
      • Le patient peut-il participer activement au processus décisionnel quotidien ? Dispose-t-il, par exemple, des capacités cognitives rendant cette participation active possible ?
      • Le patient est-il passif ou s’oppose-t-il aux soins ?
    • Contrôler dans quelle mesure le patient continue à prendre part activement à la vie quotidienne et aux activités AVQ. Les interventions orientées vers les aspects physiques et sociaux de la vie du patient peuvent limiter, chez certaines personnes les symptômes disruptifs d’un déclin cognitif (comportement oppositionnel comme la colère, l’irritation à cause des autres, un comportement agressif et un comportement asocial). C’est pourquoi, il faut stimuler la participation active :
      • Examiner s’il est nécessaire d’adapter la charge des tâches ou les circonstances dans lesquelles les tâches sont accomplies.
      • Encourager le suivi des activités dans de petits groupes.
      • Apporter des stimuli dans l’environnement comme des clignotants, un éclairage spécial, des points d’orientation reconnaissables.
      • Aider le patient de façon à lui permettre de conserver ou d’atteindre un niveau de fonctionnement aussi élevé que possible. Assister le patient par exemple dans l’exécution de des AVQ, lui donner des conseils et fractionner les tâches en plus petites sous-tâches.
    • Adapter éventuellement, avec l’aidant (voir le CAP “Support informel" pour des informations sur le surmenage et le soutien de l’aidant) le cadre de vie ou d’autres aspects de la vie du patient pour qu’il puisse continuer à fonctionner de façon aussi autonome que possible. Un soutien peut être offert par l’existence d’une tructure claire.

ETAPE 4: Suivi

  • Maintenir la situation et les performances du patient et s’entretenir des changements avec le médecin.
  • Contrôler l’usage (in)adéquat des traitements médicamenteux, faire un rapport et adapter la politique de traitement, quand le médecin en concertation avec l’équipe de soins le juge nécessaire.

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BelRAI @2007

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